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recession - Page 23

  • Les damnés et les sauvés (le sacrifice des classes populaires)


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    Personne ne conçoit les dommages collatéraux du progrès économique ni ne trace encore moins à l’avance la ligne qui va séparer les damnés des sauvés. Personne ne donne les ordres, personne ne porte la responsabilité, comme le héros décontenancé et désespéré de John Steinbeck dans Les Raisins de la colère l’apprit à son grand désarroi : voulant se battre, fusil à la main, pour défendre sa ferme qui n’était plus « économiquement viable »,] il ne réussit pas à trouver un seul responsable malveillant, auteur de son tourment et de sa détresse, sur qui tirer.
    Les appels manifestement absurdes à retourner au travail malgré la pandémie et à se sacrifier pour l’économie, deviennent de plus en plus pressants. Sans quoi la société capitaliste est menacée d’effondrement, car elle ne peut se reproduire socialement que lorsque les processus d’accumulation réussissent. L’économiste Daniel Cohen considère que l’on peut décomposer désormais la population en trois tiers après la crise : Un premier tiers qui télétravaillent en maitrisant le numérique, un deuxième tiers dont la présence est indispensable physiquement et un dernier tiers qui ne maitrisent pas le numérique et qui accomplit des tâches non indispensables. ( il estime par ailleurs qu’aux USA ce « dernier tiers » en France représenterait 45 % de la population.
    Ce sont toutes ces personnes qui vont former la légion des damnés et sont définitivement condamnés.
    S’il est une chose dont ils peuvent être certains, c’est qu’ayant été rejetés du seul jeu qui existe, ils ne font plus partie des joueurs — et l’on n’a donc plus besoin d’eux. Jadis, le fait d’être un producteur potentiel était suffisant pour remplir les conditions requises à l’admission dans la société des producteurs. Promettre d’être un consommateur diligent et prétendre au statut de consommateur ne suffît pas, cependant, pour être admis dans la compagnie des consommateurs. Cette société n’a pas de place pour les consommateurs défectueux, incomplets, inaccomplis. Que ce soit par une sentence explicite, ou par un verdict sous-entendu bien que jamais officiellement publié, ils sont devenus superflus, inutiles, non désirés et indésirables
    La production d’une humanité économiquement superflue, laquelle résulte de la crise systémique du capital se déployant par à-coups, et qui pouvait être jusqu’ici largement répercutée sur les salariés de la périphérie au cours de la concurrence de crise, frapperait donc les centres de plein fouet si la lutte contre la pandémie devait s’installer dans le temps. Nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre de nous protéger contre la pandémie dans le cadre des contraintes capitalistes. D’où le sacrifice des classes populaires dans les transports en commun.

  • Où est passé la demande ???

    Il n’y a pas besoin d’être un grand économiste pour se rendre compte de l’absurdité du travailler plus prôné par le MEDEF car ce n’est pas la peine de produire plus pour augmenter l’offre alors que la demande s’écroule. Presque tout ce qui serait fabriqué deviendrait immédiatement excédentaire en raison du chômage massif qui touche les peu qualifiés dans tous les secteurs mais aussi les hautement qualifiés dans les secteurs qui connaissent un effondrement systémique
    Il y aura un effet pauvreté qui profitera à quelques uns. Voici ce que va générer la crise en résumé

     - Une importante concentration de richesses,
      - la déstabilisation des petites et moyennes entreprises dans tous les grands secteurs de l’activité économique,        y compris l’économie des services, l’agriculture et l’industrie manufacturière.
      - la dérogation aux droits des travailleurs. Elle déstabilise le marchés du travail.
       - Elle comprime les salaires (et les coûts du travail) dans les pays dits « développés » à revenu élevé ainsi que        dans les pays en développement appauvris.
       -Travail: chômage massif chez les peu qualifiés dans tous les secteurs et chez les hautement qualifies dans les       secteurs connaissant un effondrement systémique de la demande.

    Les revenus s’écrouleront à mesure que les bénéfices s'effondreront, les petites entreprises fermeront leurs portes, pour ne jamais rouvrir, les gouvernements seront contraints de resserrer leurs dépenses avec la baisse des recettes fiscales, et quelle que soit la concurrence qui persiste, le prix du travail, des biens et des services baissera implacablement.
    La mondialisation a généré une hyper-spécialisation dans les économies locales et régionales, les privant de résilience. Toutes les économies exposées aux flux de demande d'une classe mondialisée de consommateurs avec un revenu discrétionnaire excédentaire connaitront d’énormes problèmes. C’est le cas par exemple de pays où le tourisme représente une part significative du PIB (Espagne, Croatie, France…) ou de ceux spécialisés l'extraction de matières premières.
    Toutes ces pays sont aujourd'hui confrontées à un effondrement structurel de la demande mondiale, et certaines n'ont pas d'économie locale diversifiée pour amortir le coup porté aux emplois, aux revenus, aux bénéfices et aux recettes fiscales.
    Concernant l’économie locale et le petit commerce
    des milliers de petites entreprises qui pourraient à peine survivre à une baisse de 20% des revenus sont confrontées à une baisse de 50% ou plus à perte de vue. Avec des coûts tels que le loyer, la main-d'œuvre, les frais, les taxes, un nombre énormément important de petites entreprises dans le monde ne peuvent survivre car leurs coûts restent élevés même lorsque leurs ventes chutent: les coûts sont fixes, les bénéfices glissent rapidement vers zéro et au-delà.

    Nécronomiquement votre

     

  • Au secours Céline

    Avant Raoult, il y avait Louis Ferdinand Céline !!!!

    La quinine est issue de l’écorce de l’arbre appelé le quinquina.

    Ce qu’on a appelé également « la poudre des Jésuites« , devient ensuite un traitement contre le paludisme. Mais par la suite, elle a été jugée hautement toxique, et donc on n’utilise plus la quinine pour traiter la malaria. Dès le début du 20ème siècle grâce notamment au laboratoire Bayer, des substituts synthétiques de la quinine sont créés et sont ensuite commercialisés. C’est ainsi qu’est apparue la chloroquine.CELINE.jpg

     

     

     


    Louis-Ferdinand Céline et la pharmacie par Lucie Coignerai-Devillers (1986)

    Le hasard a fait tomber entre nos mains une publication, certes déjà ancienne, sur Louis-Ferdinand Destouches, docteur en médecine, plus connu sous son nom de plume de L.-F. Céline (1894-1961) : le n° 3 Cahiers Céline (Gallimard, 1977) où sont réunis des textes médicaux de cet auteur présentés par J.-P. Dauphin et H. Godard. Il nous a paru intéressant d'en dégager un aspect peu connu de l'œuvre de cet écrivain hors série : sa contribution aux industries pharmaceutiques, au double titre de chercheur et de rédacteur publicitaire.
    Déjà, la lecture de sa thèse nous entraîne dans un univers bien étrange. Sa rédaction dans un style qui annonce le Voyage au bout de la nuit, voire Bagatelles pour un massacre, correspond bien peu à celle qui est de tradition dans ce genre de travaux. Le sujet en est connu. Épouvanté de la mortalité effroyable par septicémie qui frappait les parturientes des hôpitaux de Vienne, Semmelweis en vient à déterminer que l'infection est propagée par les mains sales des étudiants, qui effectuent des touchers sans se désinfecter les doigts : 40 % d'accouchées en meurent. Lorsqu'elles sont soignées par des infirmières aux mains désinfectées, le taux de mortalité par puerpérale tombe à 0,2 % ! Mais l'opposition des grands patrons est féroce et Semmelweis engagera un combat dans lequel sa raison sombrera. Telle qu'elle est retracée par Céline, la fin hallucinante de Semmelweis, jetant des morceaux de chair de cadavre sur les étudiants, est tellement outrée que les médecins hongrois enverront une protestation à l'Académie de Paris.
    Moins connu est un autre travail du Dr Destouches-Céline : menant une carrière en « dents de scie » qui va de l'exercice médical privé aux dispensaire d'hygiène sociale, puis à la collaboration « alimentaire » aux industries pharmaceutiques, il met au point et présente au public une spécialité, la Basedowine, ainsi composée :
    - poudre d'ovaires : 0,075
    - extrait thyroïdien : 0,05
    - monobromo isovalerylurie : 0,15
    - extrait acéto-soluble d'hormone ovarienne : 0,01(pour un comprimé).
    Le produit est enregistré au Laboratoire National de contrôle des médicaments en 1933 sous le n° 343-4 et commercialisé par les Laboratoires R. Gallier, 1 bis, place du Président-Mithouard, Paris VIIe. Il restera en vente jus qu'en 1971.
    Selon son auteur, la Basedowine est efficace contre le Basedow fruste et léger, le nervosisme thyroïdo-ovarien, si fréquent dans la population féminine des villes et des campagnes, les règles douloureuses ou irrégulières, la ménopause naturelle ou artificielle. Un bel encart reproduit dans les Cahiers Céline traduit très fidèlement et très agréablement cette notion d'équilibre retrouvé.
    En 1925, Céline- Destouches avait publié chez Doin un ouvrage sur La quinine en thérapeutique qui fut traduit en espagnol, en italien et en portugais.

    De l'exercice classique de la profession à ses incursions dans la médecine sociale et à ses travaux cités ici, on devine que Céline, plus que médecin, se voulait chercheur. Deux communications de lui à l'Académie des Sciences sur Convoluta Roscoffensis (1920) et Galleria Mellonella (1921) ont été ainsi jugées par le Pr André Lwolff : « L'une et l'autre publications portent témoignage d'une certaine hâte et d'une naïveté non moins certaine dans la pensée et dans l'expression. L'ensemble correspond assez bien à cette image du chercheur que l'écrivain, sans ménagements, tracera dans le Voyage et qui, paradoxalement, est sa propre image... Nul ne regrettera qu'il ait sacrifié le métier de chercheur à celui d'écrivain. Sa contribution à la science eût difficilement pu égaler en valeur et en originalité son apport aux lettres, qui est considérable ». (Figaro littéraire, 7-13 avril 1969).